Un email à 10 g de Co2 est une information obsolète.

Toutes les sources existantes tendent à dire qu'un email émet beaucoup de Co2 : entre 4 g de Co2 en moyenne par email à 19 g de Co2 pour les emails d'1 mo selon l'ADEME, Cleanfox l'estime lui à 10 g de Co2. Fort de ces résultats, des challenges pour réduire les emails naissent dans les entreprises, les comptes instagram écolos multiplient les invitations pour pousser les particuliers à passer à l'action : "Svp, pour la planète 🌍 : supprimer vos emails  !!"

Si tous les gestes (même les plus petits) sont utiles et nécessaires, dans cet article nous allons calculer l'impact d'un email en 2021...et le résultat devrait vous surprendre.

Commençons par les bases

La taille d'un email

Selon les sources, la taille moyenne d'un email (hors spam) se situe entre 75 ko et 80 à 100 ko. Dans notre calcul, nous allons donc prendre la moyenne la plus haute, à savoir 100 ko (soit 0.1 mo) par email.

Les facteurs d'émissions

Il y a 3 facteurs d'émissions liés à la réception d'un email :

• Le stockage de l'information (les fameux "data centers")
• Le téléchargement de l'information (les Go que vous avez sur votre forfait mobile)
• L'énergie nécessaire pour lire l'email sur votre téléphone ou sur votre ordinateur (de l'électricité en somme).

Loi de Moore

Tous les 18 mois, avec la loi de Moore, les capacités des ordinateurs sont multipliés par 2. Autrement dit, au bout de 18 mois, il faut 2 fois moins d'énergie pour produire et stocker une même information.

En 10 ans, nous améliorons donc d'environ x100 les capacités énergétiques des data centers.

Calculs

Le stockage de l'information

Tous les emails sont stockés dans des data centers... C'est la base d'internet : au lieu que l'information soit stockée localement, dans votre ordinateur par exemple, elle est stocké à distance.

Selon le fondateur de l'hébergeur infomaniak, en 2018, nous avions besoin de 96Wh par an pour stocker 1 Go de données. Même si ce chiffre a dû être amélioré depuis (avec la loi de Moore), nous allons garder ce chiffre pour nos calculs.

Stocker un email nécessite donc 0.0096 wh par an (1 go = 1.000.000 ko) . En prenant le mix énergétique mondial à 500 g de Co2 par kwh, cela donne un résultat de 0.005 g de Co2 pour le stockage d'un email pendant 1 an.

Le téléchargement de l'information

Si l'email est bien stocké sur le serveur. Lorsque nous le recevons, il faut le télécharger pour le lire. Cela nécessite à nouveau de l'énergie. Selon une étude finlandaise, grâce à l’amélioration rapide de l’efficacité énergétique des Technologies de l’information et de la communication, il faudrait désormais 100 wh en 2020 pour télécharger 1 Go de données.

Il faudrait donc 0.01 wh par email. En prenant le mix énergétique mondial à 500 g de Co2 par kwh, cela donne 0.005 g de Co2 par email.

L'énergie de l'appareil pour lire le message

Enfin, pour lire ce message, il faut un appareil qui consomme de l'énergie. Un ordinateur portable consomme par exemple entre 50 et 100 wattheure (Wh) en fonction du modèle pour une heure d’utilisation. Si lire 1 email prend 2 minutes (ce qui paraît long en moyenne), cela nécessite entre 1 et 2 wh par email.

Comme nous sommes en France et que l'éléctricité est peu carboné (80 g de Co2 en moyenne), cela équivaut à 0.16 g de Co2 (pour l'hypothèse haute).

Résultat

Le résultat final obtenu se situe entre 0.16 g et 0.17 g auquel il faut ajouter les émissions liées à la production des appareils (les data centers et l'ordinateur portable dans cet exemple). Si la production est vraiment 4 fois plus polluantes que l'usage comme l'annonce Apple, alors, un email aurait au grand maximum un impact de 0.68 g de Co2. Nous sommes très loin des chiffres annoncés par tous les acteurs.

Conclusion

Nous sommes encore au balbutiement des calculs sur l'empreinte environnementale...et donc il n'est pas étonnant de voir autant d'informations erronées. Notre calcul est lui même source de critique et sera probablement obsolète dans quelques années.

Arrêter de recevoir des emails inutiles ou supprimer ces emails plutôt que de les archiver ne sont pas pour autant des gestes dénués de sens car chaque geste compte...mais ils méritent au moins d'être mis en comparaison avec des données actualisées avec des eco-gestes qui comptent plus tels que diminuer la viande ou privilégier le vélo.

1 film Netflix a plus d'impact que tous vos emails sur une année.

Enfin, pour mettre les choses en perspective dans le monde du numérique, si un email représente environ 0.1 mo, un film sur Netflix nécessite 3 go, soit l'équivalent de 30.000 emails. Peu de chances que vous en receviez autant en 1 année. Se concentrer sur la suppression des emails n'est donc probablement le combat le plus utile.